Il était une fois une grande mare remplie de poisson ; Au fil du temps les pluies diminuèrent et la mare devient de moins en moins profonde. Un beau jour, un oiseau se posa sur le bord du rivage et dut aux poissons : « je suis vraiment désolé pour vous, les poissons. Vous avez à peine assez d’eau pour rester mouillés. Savez-vous que, pas très loin d’ici, il y a un grand lac de plusieurs mètres de profondeur ou les poissons nagent heureux ? »
Quand les poissons de la mare entendirent cela, ils en furent tout galvanisés ; ils dirent à l’oiseau : « C’est bien beau mais comment pourrions nous y aller ? » L’oiseau dit : « Aucun problème. Je peux vous transporter dans mon bec l’un après l’autre. » Les poissons en discutèrent ensemble : « la vie n’est plus vraiment belle ici. L’eau nous couvre à peine la tête. Nous ferions mieux de nous en aller. » Alors ils s’alignèrent pour que l’oiseau les emporte.
L’oiseau prit les poissons un par un. A peine se trouvait-il hors de vue de la mare et disait aux autres : « En ce moment même votre ami est en train de nager joyeusement dans le lac et il demande quand vous allez venir le rejoindre ! » Tout cela paraissait formidable aux poissons. Ils avaient hâte de partir et commencèrent à se bousculer pour être en tête de la file d’attente.
L’oiseau finit par manger tout les poissons de cette manière. Il retourna à la mare pour voir s’il en restait encore mais ne trouva qu’un crabe. Alors l’oiseau reprit son discours à propos du lac.
Le crabe était assez sceptique. Il demanda à l’oiseau comment il pourrait y arriver et l’oiseau répondit qu’il le transporterait dans son bec. Mais ce crabe était sage. Il dit à l’oiseau : « Voilà ce que je te propose : je m’assiérai sur ton dos avec le bras autour de ton cou. ET si tu essais de me jouer un mauvais tour, je t’étranglerai avec mes pinces. »
L’oiseau s’irrita de cette méfiance mais décida d’essayer tout de même, espérant avoir l’occasion de manger le crabe d’une manière ou d’une autre. Le crabe monta donc sur son dos et ils s’envolèrent. L’oiseau vola en cercles, à la recherche d’un endroit ou se poser. Mais à chaque fois qu’il essayait d’atterrir, le crabe commençait à lui serrer la gorge avec ses pinces. L’oiseau ne pouvait pas même crier pour protester, il n’émettait qu’un petit croassement sec. Finalement il dut renoncer et ramener le crabe à la mare.

Si vous êtes comme ces poissons, vous écouterez les voix qui disent combien tout serait merveilleux si seulement vous retrouviez la vie dans le monde. C’est un obstacle que l’on rencontre sur la voie. Alors j’espère que vous aurez être sages. Comme le crabe.

Tout apparaît, tout disparait de Ajahn Chah